Elle prend un café fort quand elle se sent faible. 
Son esprit part dans le décor.
Une pause, un intermède.


Je prends mon café fort pour passer en douceur de mon intimité au monde agité. 
A la lueur, je tiens à prolonger le moment où il n’y a pas d’ailleurs.
Apprécier la plénitude de la vacuité momentanée. 
Savourer l’habitude de la simplicité. 
Il me faut une dose pour oser franchir la dose qui m’expose. 
Rester à la surface. 
Attendre que ça passe. 
A l’extérieur, quand c’est trop fort, pour retrouver le confort de l’intérieur, je commande un café fort. 
Dès les premières vapeurs, il chasse la peur, il me renvoie à mes matins de vacances, à l’enfance, à ta présence. 
Il est l’élixir dans lequel tu reprends vie. 
Le rituel de nos réveils est le dernier souvenir que j’ai de toi. Il est venu masquer le pire. 
Je crois que je cherche ce moment passé d’instantané dans le présent de tous mes cafés. 
Alors l’espace d’une gorgée, je goûte à la vie d’adulte espérée, celle émancipée. 
Les arômes se mêlent au poivre, à l’ambre blond et au miel de mon parfum. 
J’enfile mon cuir. Je parcours le chemin de la vie. 
Et puis je n’oublie pas celui qui nous lie, nous offre des pauses, nous autorise à décrocher de nos fonctions, profiter de l’interaction, nous offrir une respiration. 

Elle prend un café fort quand elle se sent faible. 
Son esprit part dans le décor.
Une pause, un intermède.


La brume matinale enveloppe son esprit. 
Elle ouvre le précieux sachet de son métallique fermoir. 
Certains utilisent la poudre blanche comme stimuli, elle, dans le percolateur, son attrait est pour la noire. 
Source sombre, diverses vertues, elle se délecte de ce breuvage amer. 
Ses sens éveillés deviennent tour à tour accrus. 
Dans son regard perçant, les images de la vie s’accélèrent.

Elle prend un café fort quand elle se sent faible. 
Son esprit part dans le décor.
Une pause, un intermède
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